Pape François à la Messe dit "...demandons ensemble, dans cette Eucharistie...comme Église, comme société, de savoir refléter dans le monde...la lumière tendre du Dieu d’amour"


VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE FRANÇOIS
EN INDONÉSIE, PAPOUASIE-NOUVELLE-GUINÉE,
TIMOR ORIENTAL ET SINGAPOUR
(2-13 septembre 2024)

Mardi, le pape François a célébré une messe en plein air à Taci Tolu, une plaine côtière du Timor oriental. 600 000 personnes, soit près de la moitié de la population du pays, étaient présentes. Une danse traditionnelle timoraise a ouvert la célébration de la messe. Puis, à la tombée de la nuit, le pape a prononcé une homélie en espagnol, laissant à un prêtre timorais la possibilité de traduire ses paroles section par section en tetum, l’une des langues officielles du pays.
SAINTE MESSE
HOMÉLIE DU SAINT-PÈRE
Esplanade de Taci Tolu (Dili, Timor oriental)
Mardi 10 septembre 2024

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« Un enfant nous est né, un fils nous a été donné ! » (Is 9, 5).

Ce sont les paroles avec lesquelles le prophète Isaïe s’adresse, dans la première lecture, aux habitants de Jérusalem, à une époque de prospérité pour la ville, caractérisée aussi, malheureusement, par une grande décadence morale.

Il y a beaucoup de richesses, mais le bien-être aveugle les puissants, leur faisant croire qu’ils se suffisent à eux-mêmes, qu’ils n’ont pas besoin du Seigneur ; et leur présomption les conduit à l’égoïsme et à l’injustice. C’est pourquoi, même s’il y a énormément de biens, les pauvres sont abandonnés et souffrent de la faim, l’infidélité est répandue partout et la pratique religieuse se trouve de plus en plus réduite à une simple formalité. La façade trompeuse d’un monde à première vue parfait cache donc une réalité beaucoup plus sombre, beaucoup plus dure et cruelle, où il y a un grand besoin de conversion, de miséricorde et de guérison.

C’est pourquoi le prophète annonce à ses concitoyens un horizon nouveau que Dieu ouvrira devant eux : un avenir d’espérance, un avenir de joie où l’oppression et la guerre seront bannies pour toujours (cf. Is 9, 1-4). Il fera surgir pour eux une grande lumière (cf. v. 1) qui les délivrera des ténèbres du péché qui les opprime, et Il le fera non pas avec la puissance des troupes, des armes ou des richesses, mais par le don d’un fils (cf. v. 5-6).

Arrêtons-nous sur cette image : Dieu fait briller sa lumière qui sauve à travers le don d’un fils.

En tout lieu, la naissance d’un fils est un moment lumineux, un moment de joie et de fête, qui souvent suscite en nous de bons désirs, de nous renouveler dans le bien, de retourner à la pureté et à la simplicité. Devant un nouveau-né, même le cœur le plus dur se réchauffe et se remplit de tendresse. La fragilité d’un enfant porte toujours un message si fort qu’il touche même les âmes les plus endurcies, apportant avec elle des mouvements et des résolutions d’harmonie et de sérénité. C’est merveilleux, frères et sœurs, ce qui se passe à la naissance d’un enfant !

La proximité de Dieu passe par un enfant. Dieu se fait enfant. Et pas seulement pour nous étonner et nous émouvoir, mais aussi pour nous ouvrir à l'amour du Père et nous laisser modeler par lui, afin qu'il puisse guérir nos blessures, réparer nos désaccords, remettre de l’ordre dans notre existence.

Au Timor-Oriental, c’est magnifique parce qu’il y a beaucoup d’enfants : vous êtes un pays jeune où l’on sent partout la vie palpiter, exploser. Et c’est un cadeau, un grand don : la présence de tant de jeunesse et de tant d’enfants, en effet, renouvelle constamment notre énergie e notre vie. Mais plus encore, c’est un signe, parce que faire de la place aux enfants, aux petits, les accueillir, prendre soin d’eux, et nous faire petits, devant Dieu et les uns devant les autres, ce sont précisément les attitudes qui nous ouvrent à l’action du Seigneur. En nous faisant enfants, nous permettons l’action de Dieu en nous.

Aujourd’hui, nous vénérons la Vierge comme Reine, c’est-à-dire la mère d’un Roi, Jésus, qui a voulu naître petit, se faire notre frère, en demandant le “oui” d’une jeune femme humble et fragile (cf. Lc 1, 38).

Marie l’a compris, au point de choisir de rester petite toute sa vie, de se faire toujours plus petite, en servant, en priant, en disparaissant pour faire place à Jésus, même quand cela lui a beaucoup coûté.

Alors, chers frères, chères sœurs, n’ayons pas peur de nous faire petits devant Dieu et, les uns devant les autres, nous n’avons pas peur de perdre notre vie, de donner de notre temps, de revoir nos programmes et de redimensionner nos projets lorsque c’est nécessaire, non pas pour les diminuer, mais pour les rendre encore plus beaux par le don de nous-mêmes et l’accueil des autres.

Tout cela est très bien symbolisé par deux magnifiques bijoux traditionnels de ce pays : le Kaibauk et le Belak. Tous deux sont en métal précieux. Cela signifie qu’ils sont importants !

Le premier symbolise les cornes du buffle et la lumière du soleil. Il est placé en hauteur, comme ornement du front, comme sommet des maisons. Il évoque la force, l’énergie et la chaleur, et il peut représenter la puissance de Dieu qui donne la vie. Mais ce n’est pas tout : placé au niveau de la tête, en effet, et au sommet des maisons, il nous rappelle que, avec la lumière de la Parole du Seigneur et la puissance de sa grâce, nous pouvons nous aussi coopérer par nos choix et nos actions au grand plan de la Rédemption.

Le second, le Belak, qui se porte sur la poitrine, est complémentaire du premier. Il rappelle la douce lueur de la lune, qui reflète humblement la lumière du soleil dans la nuit, enveloppant tout d’une légère fluorescence. Il évoque la paix, la fertilité, la douceur, et symbolise la tendresse de la mère qui, par les délicats reflets de son amour, rend tout ce qu’elle touche lumineux de la même lumière que celle qu’elle reçoit de Dieu.

Kaibauk et Belak, force et tendresse du Père et de la Mère : c’est ainsi que le Seigneur manifeste sa royauté, faite de charité et de miséricorde.

Alors demandons ensemble, dans cette Eucharistie, chacun de nous, comme femmes et hommes, comme Église, comme société, de savoir refléter dans le monde la lumière forte, la lumière tendre du Dieu d’amour, de ce Dieu qui, comme nous l’avons prié dans le Psaume responsorial, « de la poussière il relève le faible, il retire le pauvre de la cendre pour qu’il siège parmi les princes » (Ps 112, 7-8).

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Chers frères et sœurs,

J'ai beaucoup réfléchi : quelle est la meilleure chose que possède le Timor ? Le santal ? La pêche ? Ce n'est pas cela la meilleure chose. Ce qu'il y a de mieux, c'est son peuple. Je ne peux pas oublier les gens sur le bord de la route, avec les enfants. Vous avez tant d'enfants ! Ce peuple, ce qu'il a de mieux, c'est le sourire de ses enfants. Et un peuple qui apprend aux enfants à sourire est un peuple qui a un avenir

Mais attention ! Parce l’on m’a dit que les crocodiles viennent sur certaines plages ; les crocodiles viennent nager et ont une morsure plus forte que celle que nous pouvons maitriser. Faites attention ! Méfiez-vous de ces crocodiles qui veulent changer votre culture, qui veulent changer votre histoire. Restez fidèles. Et ne vous approchez pas de ces crocodiles parce qu'ils mordent, et ils mordent fort.

Je vous souhaite la paix. Je vous souhaite de continuer à avoir beaucoup d'enfants : que le sourire de ce peuple soit ses enfants ! Prenez soin de vos enfants, mais aussi de vos personnes âgées, qui sont la mémoire de cette terre.

Merci, merci beaucoup pour votre charité, pour votre foi. Allez de l'avant avec espérance !

Et maintenant, nous demandons au Seigneur de nous bénir tous, puis nous chanterons un chant à la Vierge Marie.

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